Identifier la place de l'innovation radicale dans la recherche d'une transition écologique de grande échelle
Les transformations nécessaires pour maintenir l'augmentation moyenne des températures sous les 2°C sont extraordinairement profonds, systémiques, et nécessiteront une combinaison particulièrement difficile à réussir entre politiques publiques, changement de pratiques et innovation (technique, organisationnelle, d'usage, de modèle d’affaires...)
Si l'on se focalise sur l'innovation, force est de constater :
Que les d'innovation "vertes" ont significativement amélioré le bilan énergétique de nombreux secteurs, rendu viables plusieurs sources d'énergie renouvelable, etc. ... MAIS qu'elles n'ont pas pour autant infléchi de manière significative la courbe de croissance des émissions de CO2 ; que, dans l’ensemble, elles se focalisent plutôt sur l'efficience des ressources que sur des transformations qui bouleversent l'ordre établi ; que leurs effets “comportementaux” restent modestes ; qu'elles dépendent souvent de politiques publiques destinées à créer une demande. Que les formes et dynamiques d'innovation (ouverte, agile, continue, collaborative, "écosystémique"...) issues du numérique démontrent régulièrement leur capacité de transformer de manière radicale, et irréversible des secteurs entiers, des métiers, des pratiques sociales, des territoires, qui plus est avec la participation d'une partie importante de la population… ... MAIS que cette innovation continue de fonctionner comme si notre monde n'était pas fini ; que son impact écologique n'est pas sa préoccupation centrale, ni même, en général, un objectif secondaire.
Bref, que vis-à-vis de l'enjeu écologique,l'innovation joue correctement l'un de ses rôles historiques (améliorer la productivité, résoudre des problèmes...) mais pas l'autre (rebattre les cartes) !
Nous faisons l'hypothèse qu'il peut en aller autrement, si l'on en réunit les conditions. Qu'il existe un espace pour une innovation radicale dont la "proposition de valeur" intègre un impact écologique profond ("facteur 4", "zéro émissions/déchets etc.", "énergie positive"etc.), large (passage à l'échelle) et de long terme (robuste aux "effets rebond"). Nous proposons pour l'instant de la nommer "Innovation facteur 4".
>> L’expression "Facteur 4" est une manière simple (quoique réductrice) de désigner l’ampleur des transformations nécessaires pour limiter le changement climatique : elle désigne l’objectif qui consiste à diviser par 4 les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2050, en combinant la réduction des besoins en énergie et la substitution des énergies fossiles par des énergies renouvelables.
Esquisse (à débattre !) d’un périmètre : "L'innovation Facteur 4... ... "Est d'abord une innovation : elle répond à un besoin ou résout un problème ; elle apporte quelque chose de neuf à ses destinataires ; elle différencie ceux qui la portent de leur concurrence ;
... "Est - dans son ambition au moins - une innovation de rupture : il y a un avant et un après ; elle a le potentiel d'entraîner d'autres innovations ;
... "Ne s’appuie pas nécessairement sur des technologies avancées (inclut le low tech) ; peut être une innovation de produit ou de service, d'organisation, de processus, etc.
... "Place au coeur de sa proposition des objectifs environnementaux explicites et crédibles, très ambitieux (de type "facteur 4") dans leur profondeur comme dans leur étendue - et se donne les moyens de vérifier qu'elle les atteint ;
… "s’intéresse à ses impacts sur d’autres secteurs et domaines, ainsi qu’aux éventuels "effets rebond" susceptibles de limiter les bénéfices écologiques nets qu’ils entraînent.
Nous croyons que le potentiel de l'Innovation Facteur 4 existe, que des projets l'expriment déjà, mais qu'il est dramatiquement sous-exploité pour plusieurs raisons :
Parce que ces projets ne rentrent correctement dans aucune case ;
Parce que nous n'avons pas les outils nécessaires pour les évaluer (voire pour les repérer) ni, par conséquent, pour les soutenir ;
Parfois, aussi, parce qu'ils dérangent !
Dans le cadre du programme Transitions², nous voulons vous inviter dans une expédition à la recherche de l'Innovation Facteur 4. Ensemble, nous chercherons à répondre à à trois grandes questions :
Le projet est mené par la Fing, l'Iddri et Ouishare, avec le soutien de l'Ademe, Bpifrance et Orange.
Nous voulons repérer et analyser une vingtaine de projets internationaux apparaissant comme emblématiques d’une « Innovation facteur 4 », selon la définition proposée plus haut. Il pourra s’agir de projets en cours ou réalisés, réussis ou échoués, dès lors qu’ils sont documentés et que leurs initiateurs peuvent être contactés.
>> Nous proposons ici d’assumer deux simplifications successives, qui nous paraissent indispensables pour concentrer l'effort : la focalisation sur l’impact environnemental (l’économique et le social faisant alors partie du chemin plutôt que de l’objectif) et, dans ce cadre, sur la dimension climatique (énergie et émissions de GES).
>> Pour la même raison, nous focaliserons l'effort d'investigation sur quatre grands domaines :
- la mobilité
- l'économie territoriale (ex. agriculture urbaine, réseaux d'échanges locaux, "internet de l'énergie", économie circulaire...)
- les modes de vie (partage, innovations low tech, frugales…)
- les innovations "politiques" (comment rendre possible des arbitrages décisifs, des grandes décisions collectives avec un impact écologique majeur - et les appliquer !)
>> Ces restrictions ne s'appliquent cependant qu'à notre effort de recherche active de projets. Nous accueillerons avec plaisir tous les projets innovants qui pensent correspondre à la définition de l'Innovation Facteur 4, même s'ils se concentrent sur d'autres défis environnementaux (biodiversité, eau potable, pollutions...) et relèvent d'autres domaines d'application !
>>> La Grille d'entretien des projets :
Intéressé-e ? Ecrivez-nous !
Pour vous, sont-ils des projet d'Innovation Facteur 4 ? L’une des manière de cerner l’Innovation Facteur 4 est de partir tout de suite à la recherche (critique) de potentiels projets emblématiques.
Qurrent (Pays-Bas) : un fournisseur d'énergie qui favorise d'abord l'échange local d'énergies entre ses clients et l'équilibrage de la charge, jusqu'à proposer une tarification forfaitaire, indépendante de la consommation, qui l'invite lui-même à vendre le moins de Kwh possibles !
Open Source Ecology : un projet ouvert qui vise à recréer et partager des versions "libres" des 50 machines indispensables pour permettre à un village rural de vivre, conçues pour pouvoir être fabriquées, utilisées et réparées localement.
Blablacar et/ou un projet de covoiturage urbain dynamique : partager à grande échelle l’usage de la voiture.
- Tesla Powerwall : une batterie résidentielle qui se charge (idéalement grâce aux panneaux solaires du foyer) en journée et s’utilise le soir, pour viser l’autosuffisance énergétique.
- Le véhicule électrique autonome, imaginé comme le point de départ d'une "grappe d'innovations" autour de la mobilité, de l'énergie, de l'organisation urbaine, etc.