Etude PICO - Les pionniers du collaboratif

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Renaud Francou

By Renaud Francou

Link to an online resource : http://www.iddri.org/Themes/02... ( French)

Attached file : 02-PicoPaper_STUDY.pdf ( French)


Une analyse critique de l'impact environnemental de l'économie collaborative - Juin 2016

Etude PICO - Les pionniers du collaboratif

L'étude a été menée par par l’Iddri Science-Po, ESCP Europe, l’Université Paris-Sud et Paris-Dauphine, Ouishare et ZéroWaste France. et est disponible en ligne : http://www.iddri.org/Themes/02-PicoPaper_STUDY.pdf

Extrait d'un article de theconversation.com, écrit par les auteurs de l'étude :

En créant des plateformes de partage permettant de mutualiser des biens, en favorisant l’usage sur la possession, on pourrait penser mettre en place un modèle environnemental vertueux. En réalité, l’observation du fonctionnement de plateformes d’échange et d’intermédiation invite à la prudence, car de nombreux mécanismes contre-intuitifs peuvent aboutir au résultat inverse. C’est en tout cas le sens des résultats de nos travaux récents sur les impacts sociaux et environnementaux de l’économie collaborative.

En premier lieu, passer de propriétaire à usager constitue une transformation identitaire profonde pour le client, transformation qui peut être synonyme de déresponsabilisation et de détachement du client vis-à-vis du produit. C’est le syndrome connu de la voiture de location, dont la durée de vie est réduite par les comportements peu scrupuleux des clients non-propriétaires.

Ainsi, l’entreprise JCDecaux, lorsqu’elle avait lancé le service Vélib à Paris, avait-elle largement sous-estimé les coûts d’entretien induits par l’incivilité des clients envers cette nouvelle infrastructure publique. De même, un service de location peut engendrer des attentes de renouvellement plus fréquent des produits : si je m’abonne à un service pour accéder au produit, je veux le dernier modèle disponible (comprendre « le meilleur »). Dans certains cas, notamment lorsqu’elles correspondent à des offres low-cost, les offres collaboratives peuvent aussi se substituer à des solutions plus efficaces d’un point de vue environnemental. Ainsi, lorsque BlaBlaCar met en avant le covoiturage comme moyen d’augmenter le taux d’occupation des véhicules particuliers, il omet de rappeler qu’une grande partie de ce trafic est généré au détriment des transports collectifs, notamment le train, beaucoup plus efficace en matière d’émissions de CO2.

 

Troisième aspect : l’impact du transport (notamment dans l’échange et la revente de bien) est souvent négligé dans l’analyse. Or, d’un point de vue logistique, les systèmes décentralisés sont souvent moins efficaces d’un point de vue environnemental. Ainsi, un déplacement individuel de quelques kilomètres pour réaliser une transaction via leboncoin.fr annihile souvent les impacts environnementaux positifs liés à la revente ou au don du produit.

Quatrième aspect : « les effets rebonds » liés à l’utilisation de l’argent généré ou économisé par l’échange ou la revente (Demailly et Novel, 2014) doivent être pris en compte. En échangeant ma maison durant les vacances d’été, j’économise en faisant quelque chose d’utile pour l’environnement. Avec les économies réalisées, je peux partir au bout du monde en famille… en avion.

Cinquième aspect : de manière inattendue, la multiplication des plateformes d’échange et de revente peut être un outil… au service de l’hyperconsommation. Une plateforme telle que leboncoin.fr constitue ainsi un formidable marché de revente pour des produits encore fonctionnels, permettant aux consommateurs de racheter le dernier modèle. Comme l’illustre l’étude de Parguel, Lunardo et Benoit-Moreau (2016), les plateformes telles que leboncoin.fr peuvent être analysées comme un outil psychologique de déculpabilisation des comportements d’achat impulsifs et de surconsommation, en particulier chez des usagers qui se revendiquent de valeurs environnementales !

Image logo de l'article : OuiShare/Flickr, CC BY-SA